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Carte postale au vent : Avec les arbres et le vent, je danserai encore

Dernière mise à jour : 22 sept.

Dans le taxi sanitaire, quelque part sur la route de Nantes à Guipry-Messac, après l’annonce de mes derniers résultats d’examens liés à mon cancer.

 

Silhouette d’une femme face aux montagnes, symbole de liberté, de résilience et d’espoir après les résultats d’examens cancer

Le taxi sanitaire file à toute allure sur l'asphalte de la quatre-voies. Assise à l'arrière, je regarde le paysages se dérouler. Mais mon esprit ne s’y arrête pas. Ce qu'il perçoit derrière la vitre ressemble à un flou artistique, aussi flou que celui de mes pensées agitées qui s'entrechoquent et défilent bien plus vite que le ruban des champs de fin de l'été et des arbres prématurément brûlés. Les arbres sont assoiffés, leurs feuilles ont jauni bien trop vite, leurs racines crient leur soif - soif de vivre, soif de survivre. Il y a urgence. Leur sève halète, s'impatiente. Et mes pensées leur ressemblent. Elles ne frappent pas à la porte de ma conscience, elles s'imposent avec puissance. C'est une danse incontrôlée de mots, un flot de désirs, un tsunami d'envies, un barrage qui déborde et cède après avoir été contenu dans l'attente de mes derniers résultats d'examens médicaux.

Comment vit-on avec une épée de Damoclès suspendue en permanence ? Comment se projeter dans un avenir proche lorsqu'on sait qu'à tout moment tout peut basculer ? Je n'ai pas la clé, ni le mode d'emploi… Dire que je ne projette plus rien serait faux. Mais, une à deux semaines avant l'échéance, mon esprit se fige sur le jour fatidique et reporte malgré moi toutes mes décisions, grandes ou petites, à cet-instant précis. Tout devient alors comprimé, corseté, muselé. Pour ces derniers jours en suspens, je m'en remets au vent, aux arbres, au soleil, à l'eau…et j'attends, patiemment.

 

Le chauffeur écoute la radio à faible volume. Je me fiche bien de ce qu'il pense en conduisant, je n'ai aucune envie de lui parler. Je veux seulement rester dans ma bulle. Je pourrais crier de joie mais ce n'est pas l'endroit. Pourtant il faut bien exulter car on n'a pas le droit de ne pas savourer une telle annonce. La musique dans mes oreilles m'enveloppe et me transporte dans les méandres de l'exaltation. Avec elle, je me rappelle que trente minutes plus tôt, mon corps était encore assis dans le bureau de mon oncologue, figé, sous pression, tentant de décrypter son sourire qui pouvait n'être qu'un leurre pour me rassurer. « Comment allez-vous ? Pas de douleurs ? » — « Je vais très bien, merci. Mais donnez-moi les résultats, je n’en peux plus. » — « Vos résultats sont parfaits. » — « Vous en êtes sûre ? Et les marqueurs ? » — « Ils sont indétectables. » Oh, merci !

En sortant du bureau, je reprends le couloir en sens inverse et je me demande si je réalise vraiment la portée de ces mots. Non, pas encore. Mais dans l'ascenseur, mes pensées se bousculent, le barrage se lève dans un immense fracas intérieur. Quatre mois de répit. Quatre mois de sursis. Quatre mois pour vivre encore plus fort. Je peux ouvrir les vannes, me projeter au-delà du 12 septembre à 16h. Où vais-je aller ce soir ? De quoi ai-je envie, là maintenant ? Trinquer au bord de l’eau, en compagnie de la Vilaine ? Retrouver des amis ? Danser ? Courir jusqu’à perdre haleine ? Et demain ? Et dans 1 mois ? Et dans 3 mois ? Janvier sera si vite arrivé. Il faut remplir à tout prix, ne rien laisser filer. Au  cas où le temps me manquerait, au cas où la chance tournerait…

 

Le taxi file à toute allure. Les arbres renaîtront plus forts au printemps prochain, c'est certain. Avec eux je danserai encore, exaltée par le vent. Et comme eux, j’apprendrai à renaître encore, à célébrer chaque saison comme une chance accordée.


9 commentaires


Aicha
17 sept.

Bonsoir Uriell, magnifique , chaque mot vibre lorsque je le lis, je sens le souffle du vent, de la danse du coeur.... Un livre qui infuse ; je t'embrasse fort à bientot Aicha

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Uriell Hirel
Uriell Hirel
18 sept.
En réponse à

Merci Aicha ! ❤️ Ce que nous traversons en tant que malade peut toujours être transformé positivement. Pour ma part, c’est entre autres par l’écriture que je me libère. L’art a ce merveilleux mérite d’être un formidable exutoire. À chacun de trouver ce qui lui fait du bien ;-)

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Laurie
17 sept.

Sublime... cela me parle tellement. Très heureuse pour toi Uriell !

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Uriell
18 sept.
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Merci Laurie ! ❤️😘

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Rene
17 sept.

Coucou Uriell,


Magnifique texte ❤️


Il contient la lumière après l’épreuve, la promesse que même quand tout semble suspendu, il y a toujours un nouveau printemps qui revient. 🌱✨


Bravo pour tes résultats et fais-nous un petit coucou sur ESPM en annonçant ta bonne nouvelle.

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Uriell
17 sept.
En réponse à

Merci René. Oui, bien sûr, je vais l'annoncer bientôt sur notre groupe ESPM ;-)

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Mt lepage
16 sept.

Ce que tu ecris Uriell est d’une grande beaute !..on vit tes mots … on est avec toi … on devient toi …

Et combien je suis contente pour toi de savoir tes examens excellents ..

Je te souhaite des prochains mois merveilleux…. Vécus à fond comme tu sais les vivre …

Je y embrasse

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Uriell
17 sept.
En réponse à

Aahh, c'est toi Marie Thérèse ! Sur mon portable, les noms ne s'affichent pas, mais sur mon PC, si ;-)

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